Discours d’Yvon Myoken Bec

prononcé devant la très grande sangha sôtô

au temple de La Gendronnière en 2017

« Je demande avec le plus profond respect de conférer à maître Taisen Deshimaru le nom posthume de patriarche fondateur, d’abattre les murs qui nous ont séparés et de rouvrir les portes des lieux saints de La Gendronnière à ceux qui en ont été trop longtemps éloignés. »

Photo : Dojo du temple Hoboji situé à 35km de Budapest (mokushozen.hu).

Je suis avant tout un moine de maître Deshimaru. Après sa mort, je suis le premier parmi les disciples de Sensei à avoir opéré le retournement qui, de frère dans le Dharma, a fait de moi le premier disciple historiquement déclaré de maître Zeisler, Sobo Mokusho Senku Daiosho.

Envoyé par lui à Budapest j’y ai établi en son nom la Mokusho Zen Hàz, la Maison Mokusho. Certifiant cette mission, maître Kosen Thibaut m'a transmis le Dharma en 2002 selon le rite établi ici même, en cette Gendronnière, par maître Renpo Niwa Zenji.

La Mokusho Zen Hàz a établi quatre temples principaux : Hoboji et Taisenji en Hongrie, Mokushozenji en Roumanie et Senkuji en Équateur

J’ai transmis le Dharma à quatre successeurs dans la lignée Deshimaru Zeisler : Vincent Keisen Vuillemin, Maria Teresa Shogetsu Avila, Laszlo Toryu Kalman et Ionuts Koshin Nedelcu.

Durant ces vingt-cinq années d’enseignement, tout en perpétuant le style et le Dharma de ma lignée, je me suis intéressé à la manière dont d’autres maîtres occidentaux enseignaient le Dharma qu’ils avaient reçu. C’est ainsi que j’ai beaucoup pratiqué avec maître Taiten Guareschi et Zentatsu Baker Roshi, seul successeur occidental de Shunryu Suzuki, affinant constamment les formes pratiquées dans le dojo, me libérant du tabou des koans, m’éveillant à la pratique des oryoki, me menant à comprendre que ce qui m'était jusque-là apparu comme formalisme était en réalité l'expression de mushotoku. J’envoie régulièrement mes meilleurs disciples pratiquer chez ces deux maîtres.

Comment pourrions-nous négliger la tradition japonaise ? Qui dit transmission dit tradition. Mais, me référant à la distinction maintenue entre transmission spirituelle et organisations initiatiques, je distingue fondamentalement la tradition de notre famille Sôtô des formes et règles particulières à la Shumucho japonaise en lesquelles nous ne reconnaissons pas.

Et en particulier, nous ne considérons pas Taisen Deshimaru comme un sokan de l’école, fût-il le premier, mais bien comme patriarche fondateur du zen européen au rang de Bodhidharma en Chine, Dôgen et Keizan au Japon, Suzuki et Maezumi en Amérique. Cependant lorsque je désire m’enquérir en pratique de la tradition japonaise, je me rends au monastère de Fudenji qui est à mes yeux dépositaire authentique de notre tradition Sôtô.

Il y a deux ans, lors de la Mokusho 25, à l’occasion du vingt-cinquième anniversaire de sa mort, la grande sangha dans son ensemble a conféré à Mokusho Zeisler le nom honorifique posthume de Sobo, trésor de la Sangha. Aujourd’hui, en son temple de La Gendronnière, à l’occasion du cinquantième anniversaire de son arrivée en Europe, je demande avec le plus profond respect de conférer à maître Taisen Deshimaru le nom posthume de patriarche fondateur, d’abattre les murs qui nous ont séparés et de rouvrir les portes des lieux saints de La Gendronnière à ceux qui en ont été trop longtemps éloignés.